Éric Bouvet : 40 ans de témoignages, de Mandela à l’Ukraine
Dans ce vingtième épisode du podcast Photo Storia, Julien Gérard reçoit une figure emblématique du photojournalisme français : Éric Bouvet. Pendant près d’une heure, il nous ouvre les portes de ses quarante années de carrière, une vie passée à être le témoin privilégié des grands bouleversements de notre monde. L’échange débute sur une note puissante, avec le souvenir intact de sa poignée de main avec Nelson Mandela. C’est ce type de récit qui illustre la force d’un podcast photojournalisme : transmettre non seulement l’information, mais aussi l’émotion brute de l’instant. L’épisode est une véritable masterclass sur la manière de raconter des histoires, qu’elles soient visuelles ou sonores.
L’audace comme moteur : les débuts d’un photojournaliste
Ce qui frappe chez Éric Bouvet, c’est un mélange de talent et de culot phénoménal. Il raconte avec humour et franchise comment l’audace a été le fil rouge de ses débuts. Apprenant le développement couleur en une journée à l’AFP pour décrocher un poste au Club Med, s’incrustant à l’Élysée au milieu des photographes de légende en criant « Presse ! », ou encore finançant sa passion avec des petits boulots de barman ou de charbonnier… Ces anecdotes, aujourd’hui impensables, dépeignent une époque où l’instinct et la détermination pouvaient ouvrir toutes les portes. Son récit le plus fou reste sans doute celui du détournement d’un avion de ligne entre le Burkina Faso et le Mali avec seulement 200 dollars, en négociant directement avec le pilote.
Au cœur du conflit : la gestion de la peur et du danger
Le métier de photo-reporter confronte inévitablement à la violence et au danger. Éric Bouvet aborde avec une grande lucidité son expérience récente en Ukraine, où il a dû faire le mort pendant des heures pour échapper aux snipers. Il explique comment, dans ces situations extrêmes, la maîtrise de soi est capitale. Il faut savoir canaliser sa peur pour que le cerveau continue de prendre les bonnes décisions. C’est une leçon fondamentale que ce podcast photojournalisme met en lumière : derrière chaque cliché de guerre, il y a une gestion du risque et une résilience humaine extraordinaires. Il évoque également ses reportages en Tchétchénie, où il était intégré avec les commandos russes, une expérience qui a donné naissance à son livre auto-édité « Jusqu’au bout ».
De l’instant capturé au livre : la transmission de la mémoire
Pour Éric Bouvet, le travail ne s’arrête pas à la prise de vue. La transmission est essentielle, et elle passe notamment par l’objet livre. Il partage sa démarche, qui alterne entre le circuit classique de l’édition et l’auto-édition, comme pour son « Journal 40 ans ». Cette indépendance lui permet de maîtriser entièrement le récit et de porter des projets qui lui tiennent à cœur, comme son travail sur les veuves du génocide au Rwanda ou son livre hommage sur la dernière mine de charbon de France. En nommant chaque mineur, il ne se contente pas de documenter la fin d’une ère industrielle ; il rend leur dignité à des hommes et préserve un pan de la mémoire collective française.
Diffusé également sur Wave Storia.
Un projet maison réalisé par Audio Pictura.